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21 juillet 2023Qu'est-ce qu'un trauma sexuel ?
Lorsque l'on parle de trauma sexuel, il convient de revenir sur les fondamentaux et d'être très vigilant quant aux biais cognitifs, aux lieux-communs et autres inconvénients que les charges émotionnelles, liées au sujet, peuvent entraîner.
Trauma sexuel & agression sexuelle
La première erreur à éviter est la confusion entre trauma sexuel et agression sexuelle.
Une agression reste un événement. Un événement en soi n’est pas un trauma. Pour qu’il y ait trauma, il faut qu’il y ait expérience. Une expérience est définie par la charge émotionnelle liée à l’événement vécu. C’est là qu’il faut redire que les êtres humains produisent
constamment des émotions même s’ils n’en conscientisent qu’une faible partie d’entre elles. La production émotionnelle se caractérise par une décharge de neurotransmetteurs et autres neuropeptides dans le corps. C’est une configuration neurochimique précise. Ainsi, nous ne vivons jamais des événements mais toujours des expériences.
Ce qui va caractériser un trauma, c’est la répression, la non extériorisation de tout ou partie de la charge émotionnelle de cette expérience. Du point de vue neurochimique, l’extériorisation de la charge émotionnelle permet la métabolisation par les voies habituelles, respiration, transpiration, urine, selles, de cette neurochimie sensée être provisoire.
Pour illustrer mon propos, retenez qu’un viol n’est pas un trauma sexuel. En soi, c’est un événement.
L’introduction d’un corps étranger sans autorisation libre, avisé et consenti. Ce qui fera de ce viol une expérience c’est précisément la charge émotionnelle produite par le sujet pendant l’événement. Il y aura trauma si la personne agressée n’extériorise pas dans les délais impartis la totalité de la charge émotionnelle de cette expérience. On peut donc vivre une agression sexuelle sans pour autant en faire un trauma. Par ailleurs, on peut se faire un trauma sexuel sans qu’il y ait agression.
L’extériorisation émotionnelle face un trauma sexuel
Par nature, une émotion sera extériorisée, puisque c’est sa définition même. Étymologiquement, une émotion est un mouvement vers l’extérieur. Il est dans l’ordre naturel des choses que ce mouvement soit extériorisé. Il est donc préjudiciable que ce mouvement soit contrarié et plus encore réprimé.
L’extériorisation émotionnelle peut être réalisée par un processus thermique ou un processus mécanique. Certaines émotions sont dites chaudes lorsque les autres sont dites froides.
Une émotion chaude met le corps en mouvement
Si vous êtes en colère, si vous êtes dégoûté, vous aurez tendance à beaucoup bouger quitte à faire preuve de violence physique ou verbal, ce qui reste un processus mécanique.
Une émotion froide aura tendance à contracter le corps.
Si vous êtes triste ou mélancolique, vous avez tendance à vous recroqueviller sur vous-même, puis certainement vous mettre à pleurer ou trembler, ce qui dénote un processus thermique.
Retenez que vous exposer à des températures élevées, vous permettra d’extérioriser rapidement des émotions froides. Vous exposer à des températures froides facilitera l’extériorisation d’émotions chaudes. Vous êtes triste, faites-vous un hammam. Vous êtes en colère, prenez une douche froide.
Il existe de très nombreuses occasions de se faire des traumas sexuels sans pour autant qu’il y ait agression, y compris dans des rapports sexuels totalement consentis. Je ne serai pas surpris que l’essentiel des traumas sexuels ne soient pas la résultante d’agressions.
Les conséquences d’un trauma sexuel
Maintenant que nous sommes au clair sur la définition du trauma, voyons les conséquences possibles. Dans le cas d’un trauma sexuel comme pour les autres, il y a deux types de conséquences possibles et non pas un seul. J’évoquerai en premier celui que beaucoup omettent, c’est à dire, la croissance post-traumatique. En effet, si j’ai vécu une expérience dont la charge émotionnelle était très désagréable et intense, et que dans les délais impartis, j’ai pu extérioriser la totalité de cette charge émotionnelle, je ne m’en suis pas fait un trauma. J’ai renforcé mon anti-fragilité. Loin d’en subir les conséquences, je me suis renforcé dans l’épreuve. La croissance
post-traumatique est étrangement absente des protocoles thérapeutiques, alors, qu’à mon sens elle représente leur justification même. À quoi me sert-il de suivre une démarche thérapeutique si cette démarche n’est pas en soi thérapeutique ?
Concentrons-nous maintenant sur la deuxième conséquence possible du trauma, qui est le traumatisme. Lorsque tout ou partie de la charge émotionnelle en lien avec une expérience n’a pas été extériorisé, il va se passer un certain nombre de perturbations dans le corps et particulièrement au niveau de la configuration neurochimique de la personne qui a vécu le trauma. Ces perturbations neurochimiques vont s’accompagner d’une tendance à l’hypervigilance. Le système nerveux identifiera comme un stress toutes les informations composantes de l’expérience traumatique, directement ou indirectement, au sens propre ou figuré. On parle ici de la loi morcellaire du cerveau.
Pour vous donner un exemple, si vous vivez un trauma sexuel le 1er mai, il ne sera pas surprenant pour vous de devenir allergique au pollen. Si vous n’avez pas compris, le 1er mai est le jour du muguet, le muguet est une fleur et les fleurs produisent du pollen. Votre système nerveux va produire une réponse de stress : agressivité, fuite ou sidération face à la moindre information qui rappellerait à votre inconscient cette expérience. Je vous laisse imaginer la quantité d’énergie dévolue à ce retraitement temporel. Vous aurez également compris que l’énergie dévolue au retraitement temporel n’est plus disponible pour les autres systèmes du corps. Le système digestif, endocrinien, cardiovasculaire, immunitaire, tégumentaire, fascial, respiratoire et les autres, subiront donc des dommages dus à des dysfonctionnements croissants. Une voiture fonctionne toujours moins bien si elle manque de carburant, d’huile ou d’eau.
L’hypervigilance
Cette hypervigilance vécue au présent va également déclencher une anxiété qui représente le même mécanisme d’hypervigilance, mais cette fois pour des éléments à venir. Il est fort possible que les années qui suivent votre agression, au mois de mai, vous ressentiez des sensations désagréables diffuses et incompréhensibles, dès le mois d’avril, voire dès le début du printemps.
Le mois de mai, suit le mois d’avril, qui suit le début du printemps au mois de mars. Cette hypervigilance et cette tendance à l’anxiété en arrivera à produire un certain niveau d’aliénation. Le mot n’est pas trop fort vu qu’il s’agit d’une modification de la personnalité. Un traumatisme vous fait devenir une personne que vous n’êtes pas à l’origine. La personnalité constituant la façon que nous avons de percevoir, d’interpréter le monde, notre façon de penser, de réagir et d’agir, c’est elle qui est à l’origine de notre réalité personnelle. C’est ainsi qu’une personnalité traumatisée sera victime de nouveaux traumas du fait même de sa personnalité. Ceci explique la récurrence de certains phénomènes dans nos vies et leurs difficultés croissantes lorsqu’il s’agit de traumatismes. Cette récurrence produit chez le sujet un sentiment d’impuissance, la sensation de ne pas pouvoir sortir de sa situation et de la récurrence des conséquences, de plus en plus désagréable dans sa vie. Ce sentiment d’impuissance va à nouveau exacerber les perturbations dans le corps puisque le sentiment d’impuissance produit lui aussi une configuration neurochimique.
Les étapes du cercle traumatique
Perturbation dans le corps, hypervigilance, anxiété, aliénation, sentiment d’impuissance qui viendra aggraver les perturbations dans le corps, qui renforceront l’hypervigilance, qui renforcera l’anxiété, qui aggravera l’aliénation, qui aggravera le sentiment d’impuissance, qui aggravera les perturbations dans le corps etc. Malheureusement, la grande tendance des démarches thérapeutiques, quelle qu’elles soient, vise seulement à réduire l’inconfort du cycle traumatique sans pour autant le casser. Bien entendu, on ne peut pas casser un cercle traumatique dont on ignore l’existence.
Plus d’un quart de siècle de pratique et d’accompagnement des personnes victimes de trauma, ma amené à constater la méconnaissance des mécanismes traumatiques et les limites des accompagnements proposés aux personnes traumatisées. Je ne parle même pas des personnes qui ignorent totalement qu’elles sont l’objet de traumas sexuelles, puisque aucun professionnel de santé ou de l’accompagnement ne l’aura décelé.
Roméo Cournal - Coach intuitif et formateur en neurosciences